Le regard de Marianne, DRH d’une scale-up tech, est rivé sur un open-space étrangement silencieux. Sur dix postes de développeurs prévus, seuls six sont occupés. Et ce n’est pas faute d’avoir proposé des CDI avec salaires confortables : les candidats se font rares, ou déclinent pour des statuts plus flexibles. En 2025, les entreprises doivent explorer de véritables alternatives au CDI en informatique pour mener à bien leurs projets.
Le constat est alarmant : plus de la moitié des recruteurs (54 %) n’arrivent pas à trouver de candidats qualifiés. D’après France Travail, 57,4 % des recrutements sont aujourd’hui jugés difficiles, un record. Résultat, 25 500 postes IT restent vacants en 2024 (un chiffre qui pourrait grimper à 180 000 d’ici 2030). Pendant ce temps, les équipes en place s’épuisent, les délais s’allongent et la concurrence s’organise. Face à cette pénurie de talents sans précédent, recruter uniquement en CDI ne suffit plus : il faut repenser le recrutement IT et composer avec d’autres formats de collaboration.
Alternatives au CDI en informatique : un phénomène en plein essor
Le monde du travail tech a basculé. En l’espace de quelques années, le freelancing et autres formes d’indépendance sont passés d’une curiosité marginale à un véritable phénomène de fond. Le nombre de freelances en France a atteint 1,2 million en 2024 d’après Malt, contre 1,1 million en 2023 et seulement 1 million en 2021. Cela représente une croissance de +92 % depuis 2009 !
Autrement dit, la tech française voit surgir une armée de talents qui opte pour l’indépendance plutôt que le salariat classique. Pourquoi un tel engouement ? D’abord parce que les aspirations des professionnels de l’IT ont évolué. Loin d’être un choix par défaut, le freelancing est très souvent un choix d’adhésion. 90 % des freelances français se déclarent indépendants par véritable choix (96 % dans les métiers tech). Et 84 % ne souhaitent pas redevenir salariés. Ce rejet du cadre rigide de l’emploi traditionnel s’explique par la quête de liberté, de sens et d’autonomie. Selon l’étude Malt & BCG, les trois motivations principales à devenir freelance sont : la possibilité de gérer son temps à sa guise (81 %), choisir ses projets (76 %) et travailler d’où l’on veut (73 %). Cette réalité bouscule l’image du CDI comme graal ultime de la carrière.
Ensuite, la géographie et l’organisation du travail se sont transformées. Après la généralisation du télétravail et l’accélération digitale post-Covid, les entreprises acceptent mieux le travail à distance et les collaborations à la mission. En 2024, on constate une hausse de 30 % des entreprises adoptant le travail à distance. Pour les experts, la localisation importe moins : un développeur peut résider à Nice et collaborer avec une startup basée à Paris ou Londres sans jamais mettre les pieds au siège. Ce contexte a fait tomber bien des barrières à l’embauche de freelances. L’expertise prime sur la présence physique. D’ailleurs, l’âge moyen du freelance IT est de 37 ans, signe qu’il s’agit souvent de professionnels expérimentés, et non de débutants précaires. Le message est clair : pour attirer ces experts, il faut leur offrir autre chose qu’un CDI « classique ».
Rapidité : trouver un talent en quelques jours au lieu de plusieurs mois
Sur le terrain, la différence de vitesse entre un recrutement en CDI et le recours à un freelance est énorme. En interne, décrocher un développeur en CDI relève souvent du parcours du combattant : diffusion d’annonce, sélection de CV, entretiens multiples, négociation… Le processus d’embauche dure entre 40 et 60 jours en moyenne rien que pour trouver la perle rare. Et une fois l’oiseau rare repéré, encore faut-il composer avec un préavis de départ : dans l’IT, un cadre en poste doit souvent prévenir 3 mois à l’avance son employeur actuel. Au total, il n’est pas rare qu’un poste critique reste inoccupé pendant 4 à 6 mois après le lancement du recrutement ! Dans un secteur où les cycles d’innovation sont très courts, ce délai est un luxe que peu peuvent se permettre.
À l’inverse, solliciter un freelance permet de réduire drastiquement ces délais. Sur le marché des indépendants, tout va plus vite : les entreprises contactent directement des experts disponibles, sans avoir à passer par toutes les étapes administratives d’un CDI. Par exemple, une plateforme freelance spécialisée comme la plateforme freelance FreelanceRepublik s’engage à présélectionner jusqu’à 3 profils qualifiés en moins de 48h. En quelques clics, vous accédez à un vivier de talents vérifiés prêts à intervenir. De plus, beaucoup de freelances peuvent démarrer une mission sous une semaine, voire sous 24h s’ils sont entre deux projets. Cette réactivité change la donne : une entreprise peut lancer son projet maintenant, plutôt que de repousser ses échéances de trimestre en trimestre.
Flexibilité : des ressources adaptables au rythme de vos projets
Outre la rapidité, la flexibilité est l’autre grand avantage des alternatives au CDI en informatique. Qui dit CDI dit contrat rigide : horaires standard, temps de travail hebdomadaire fixe, processus de rupture contraignant. Au contraire, un freelance apporte une agilité précieuse. L’entreprise peut ajuster la voilure en fonction de ses besoins, de manière quasi instantanée :
- Effectif modulable : Renforcer son équipe IT pour un projet critique puis la réduire une fois le projet terminé, sans passer par la casse plan social ou ruptures de contrat complexes.
- Compétences à la carte : Faire appel à un expert pointu uniquement le temps nécessaire (quelques jours ou mois), là où un CDI imposerait de trouver des tâches à plein temps sur la durée.
- Horaires étendus si besoin : Les freelances sont souvent disposés à travailler en soirée ou le week-end pour tenir des délais serrés, là où un salarié compte ses heures. En cas de rush, cette souplesse évite de décevoir un client ou de manquer une opportunité de marché.
Autre aspect clé : la facilité de mettre fin à la mission lorsque le besoin s’achève. Un CDI ne peut être rompu du jour au lendemain – la loi impose des démarches longues, préavis, indemnités, etc. –, ce qui freine les entreprises dans leurs ajustements d’effectifs. À l’inverse, un freelance est engagé pour une durée déterminée ou un projet ponctuel : une fois la mission terminée et livrée, la collaboration prend fin simplement, sans formalités lourdes ni coût caché. Ce gain de flexibilité permet à l’entreprise de gagner du temps et de l’argent tout en augmentant sa productivité. En clair, l’informatique « à la demande » via des freelances offre un levier de performance que le modèle 100 % CDI ne peut égaler.
Coûts : le CDI est-il vraiment plus économique ?
Beaucoup d’employeurs pensent qu’un freelance revient plus cher qu’un salarié en CDI. Il est vrai qu’à première vue, le tarif journalier d’un freelance peut sembler élevé. Par exemple, un développeur indépendant peut facturer 500 à 800 € par jour, ce qui correspondrait à un salaire annuel brut largement supérieur à 100 000 €. Mais cette comparaison directe est trompeuse. Pourquoi ? Parce que le coût total d’un CDI dépasse largement son simple salaire mensuel.
Un ingénieur d’études CDI payé 50 000 € brut par an coûte en réalité près de 65 000 € à l’entreprise après ajout des charges patronales (sécurité sociale, retraite, assurance chômage). Et ce n’est qu’un début : il faut ajouter les avantages sociaux (congés payés, mutuelle, tickets resto, etc.), le matériel et les licences logiciels mis à disposition, l’espace de travail (bureau, électricité, etc.) et les coûts de recrutement initiaux. Publier des offres, passer du temps à trier des CV et multiplier les entretiens engendre un vrai coût caché. Sans parler de la formation du nouvel arrivant, qui mettra parfois des mois avant d’être pleinement productif.
Avec un freelance, bon nombre de ces coûts s’envolent. Pas de congés payés ni d’arrêt maladie à financer, pas de cotisations salariales à payer (le freelance paie lui-même ses charges sociales sur sa facture), pas de prime d’embauche, ni de dédit en cas de départ anticipé. Un freelance arrive opérationnel et autonome : l’entreprise n’a généralement pas d’effort de formation initiale à fournir, il est habitué à être efficace dès les premiers jours. De même, l’infrastructure coûte moins cher : beaucoup de freelances travaillent à distance (pas besoin de bureau supplémentaire) et utilisent leur propre équipement. Enfin, le processus d’embauche est simplifié : passer par une plateforme ou un cabinet spécialisé demande bien moins de temps que de sourcer un CDI, et si la collaboration ne fonctionne pas, on y met fin rapidement sans batailles juridiques.
En fin de compte, faire appel à un freelance peut coûter moins cher pour un besoin ponctuel ou un projet bien défini. Par exemple, pour un développement de 6 mois, payer un freelance 600 € par jour reviendra moins cher que d’embaucher un CDI à l’année et de le garder inactif une fois le projet terminé. Évidemment, si le besoin est permanent et à temps plein sur plusieurs années, le CDI retrouve l’avantage économique. L’astuce en 2025 est donc de mixer les deux : utiliser les freelances pour ce qu’ils savent faire de mieux (les missions intenses et spécialisées), et conserver des CDI sur les fonctions stratégiques de long terme. Ainsi, le budget RH est optimisé, et chaque euro investi l’est à bon escient.
Engagement et fidélité : les freelances s’investissent-ils autant que vos équipes ?
Un autre frein psychologique au freelancing c’est la crainte d’un manque d’engagement. Un employé en CDI est censé être attaché à l’entreprise, être « fidèle » sur la durée, alors que l’indépendant multiplierait les missions sans lien affectif. Mais la réalité de terrain en 2025 nuance fortement cette opposition.
D’abord, la fidélité des salariés IT en CDI n’est plus garantie. Dans un marché hyper sollicité, un développeur peut recevoir des propositions alléchantes tous les mois. Il n’est pas rare qu’il quitte son poste au bout de 2 ans pour relever un nouveau défi ou obtenir une augmentation ailleurs. D’ailleurs, un recrutement IT sur deux échoue dans les 18 premiers mois (départ anticipé, échec de la période d’essai, etc.). L’argument de la stabilité du CDI est donc tout relatif dans le contexte actuel.
Ensuite, les freelances ont tout intérêt à satisfaire leurs clients et à construire une relation durable. Contrairement à l’idée du mercenaire volage, la plupart visent au contraire la récurrence. Leur réputation et leur bouche-à-oreille en dépendent. Selon une étude récente, la majorité des freelances préfèrent avoir quelques clients réguliers plutôt qu’une myriade de missions éphémères. Et 97 % des ingénieurs qui passent indépendants le font par choix et mettent un point d’honneur à satisfaire leurs clients, dans le but de les fidéliser. Ils ont pleinement conscience que leur prochaine mission dépend de la réussite de la précédente, ce qui les incite à livrer un travail impeccable.
Enfin, de nombreux freelances s’intègrent très bien dans les équipes en place. Lorsqu’une mission indépendante dure plusieurs mois, le freelance finit souvent par devenir un véritable partenaire de l’entreprise, s’impliquant comme s’il était interne. Son expérience variée apporte un regard neuf et des compétences à jour qui profitent à l’ensemble de l’équipe. En ce sens, l’opposition « engagement vs flexibilité » tend à s’estomper : on peut être flexible et impliqué. Ce que recherchent les entreprises, ce sont des résultats ; or, un freelance bien choisi a autant – sinon plus – à cœur de réussir la mission qu’un employé classique, puisque sa réputation en dépend directement.
Vers un modèle hybride : combiner CDI et freelances pour ne plus choisir
En 2025, les CDI ne suffisent plus, mais cela ne veut pas dire qu’il faut les opposer frontalement aux freelances. La stratégie gagnante pour la plupart des entreprises tech consiste à marier le meilleur des deux mondes. D’un côté, on conserve un noyau de collaborateurs en CDI pour la vision à long terme, la transmission des connaissances sensibles et la culture d’entreprise. De l’autre, on intègre des experts indépendants en fonction des besoins, pour apporter flexibilité, compétences pointues et rapidité d’exécution. Ce modèle hybride offre à la fois la stabilité et l’agilité : un avantage compétitif décisif dans le secteur IT actuel.
D’ailleurs, de nouvelles solutions apparaissent pour faciliter ce mariage. Le portage salarial en est un exemple : il permet à un freelance de conserver son autonomie tout en étant salarié d’une société de portage, qui gère l’administratif et lui offre une protection sociale. C’est un moyen de sécuriser les collaborations indépendantes pour les deux parties, sans renoncer à la souplesse. Plus largement, les directions IT apprennent à piloter un effectif « augmenté », où permanents et externes travaillent main dans la main vers les mêmes objectifs.
Bien sûr, recourir davantage aux talents externes impose de nouvelles pratiques managériales. Gestion à distance, onboarding accéléré, communication multi-statuts… Autant de défis à relever pour tirer pleinement parti de ce gisement de compétences extérieures. Attention à ne pas tomber dans certains pièges : externaliser un projet IT sans préparation peut mener à de graves déconvenues. Sur le sujet, notre dossier sur les erreurs à éviter lorsqu’on externalise un projet informatique vous aidera à ne pas faire de faux pas.
En conclusion, la pénurie de talents et la transformation des aspirations professionnelles obligent les entreprises à innover dans leur gestion des ressources humaines. Celles qui sauront construire un écosystème de talents hybride – associant CDI sécurisants et freelances performants – disposeront d’une longueur d’avance pour relever les défis de la décennie.