Jongler entre une réunion client et un change de couche, travailler avec un bébé qui babille en fond sonore, ou envoyer un devis d’une main tout en berçant le dernier né de l’autre… Pour beaucoup de freelances parents, c’est le quotidien. Et si vous vous sentez concerné, rassurez-vous : vous n’êtes pas seul. D’après une étude récente, 41 % des freelances sont parents (contre 33 % des salariés classiques). Normal, quand on sait que l’âge moyen des freelances tourne autour de 37 ans – en plein dans la tranche d’âge où l’on découvre les joies des nuits blanches et des dessins animés à 6h du matin !
Une majorité de freelances se lancent dans l’aventure de la parentalité en pleine carrière. Être freelance et parent à la fois, c’est un numéro d’équilibriste permanent qui concerne de nombreux indépendants.
Freelancing et parentalité : ce que disent les chiffres (et la réalité)
Beaucoup de freelances travaillent autant (voire plus) que des salariés. L’image du freelance chômant peinard est un mythe. En France, plus de la moitié des freelances (53 %) bossent au-delà de 40 heures par semaine. Dans le détail, 30 % y consacrent 30 à 40 h, 38 % entre 40 et 50 h, et 12 % montent même jusqu’à 50-70. Seuls 17 % travaillent moins de 30 h. Autant dire que le freelancing n’est pas des vacances : on y retrouve une charge de travail similaire à un emploi classique. Pas étonnant que certains frôlent le burn-out (3 % des indépendants avouent dépasser 70 h hebdo !). Rajoutez des enfants à cela, et l’équation se corse…
Pourquoi diable se lancer en freelance avec des enfants ? Pour beaucoup, c’est justement pour mieux concilier boulot et famille. 74 % des freelances citent la quête d’un meilleur équilibre vie pro/vie perso comme motivation principale à se lancer. La flexibilité est un atout énorme quand on a des mômes : ne plus demander la permission pour aller à la kermesse, pouvoir travailler tôt le matin ou tard le soir selon le rythme des siens, éviter les trajets inutiles… À titre de comparaison, une étude a montré que 71 % des parents salariés vivent mal un retour imposé au bureau, y voyant un impact négatif sur leur équilibre de vie. Le message est clair : la flexibilité n’est pas un luxe, c’est une nécessité quand on élève des enfants.
Mais flexibilité ne rime pas automatiquement avec sérénité. Cependant, l’envers du décor, c’est qu’il n’y a pas de RH pour tenir la main du freelance parent : à vous de gérer vos droits, votre congé, vos imprévus. Et surtout, la frontière travail/maison devient très poreuse. Quand on bosse depuis la salle à manger, la famille a parfois du mal à comprendre que vous n’êtes pas disponible en permanence. Combien de freelances entendent encore : « Puisque tu travailles à la maison, tu peux garder le petit aujourd’hui, non ? » Résultat, la tentation est grande de tout faire en même temps… au risque d’exploser.
La charge mentale pèse souvent davantage sur les mères. En France, les femmes continuent d’assumer la plus grande part du travail domestique et s’occupent encore majoritairement des enfants. Après la naissance, elles sont 2,5 fois plus nombreuses que les hommes à prendre un congé parental ou à passer à temps partiel. En freelancing, cela se traduit par une réduction des missions ou du temps de travail (et donc des revenus) pour beaucoup de mamans freelances. Les papas, eux, doivent éviter de reproduire ce schéma où “maman gère tout”. En somme, équilibrer freelancing et parentalité est souvent un défi plus grand pour les mères.
En résumé, le freelance-parent type court après le temps. Il veut bien faire pour ses clients et bien faire pour sa famille, dans des journées toujours trop courtes. Les freelances parents jonglent chaque jour, entre contraintes et libertés, entre vie pro et vie perso. Alors comment ne pas se casser la figure dans ce grand écart permanent ?
Nos 7 conseils d’experts pour gérer (sans craquer)
Alors, comment survivre entre clients relous et couches sales tout en restant pro, productif et parent épanoui ? Voici 7 bonnes pratiques inspirées des conseils d’experts (psychologues du travail, coachs en organisation, RH) et du vécu de freelances aguerris. Objectif : vous aider à garder la tête hors de l’eau et à profiter du meilleur des deux mondes, sans vous arracher les cheveux.
Planifiez (réalistement) et acceptez que 24h resteront 24h
Votre emploi du temps est déjà bien rempli ? N’essayez pas d’y caser la parentalité entre deux rendez-vous comme si de rien n’était. Christèle Albaret, psychosociologue, explique qu’il est impossible de jongler avec un agenda trop chargé en espérant s’en sortir avec les enfants entre deux réunions. Listez toutes vos tâches (pro et perso), évaluez leur poids, puis bloquez des plages horaires spécifiques pour chaque activité. Par exemple, pas de prospection entre 17h et 20h si c’est le moment de la routine des enfants. Et surtout, laissez du mou dans votre planning pour les imprévus. Un planning bien fait tolère l’imprévu !
Apprenez à dire non (et à poser vos limites)
Savoir dire non est essentiel pour gérer son temps en tant que freelance-parent. Un « non » poli à un client vaut mieux qu’un « oui » qui vous met sur les rotules. Fixez des limites claires, comme pas de mails pro après 20h ou pas de travail le dimanche (sauf urgence). Communiquez vos créneaux de disponibilité à vos clients dès le départ. Avec votre entourage, expliquez-leur que travail à la maison ≠ disponibilité 24/7. Personne ne posera vos limites à votre place.
Priorisez sans pitié et déléguez ce qui peut l’être
Vous ne pouvez pas tout faire parfaitement. Identifiez vos tâches prioritaires et mettez de côté ce qui peut attendre. Classifiez vos tâches par taille et déléguez ce que vous pouvez. Cela peut être sous-traiter une mission pro ou faire appel à une baby-sitter pour quelques heures. Déléguer, c’est alléger votre charge mentale. Concentrez vous là où vous êtes indispensable et acceptez l’aide pour le reste.
Organisez vous comme un chef (d’orchestre)
Pour tenir la cadence, il vous faut une organisation en béton. Utilisez des outils comme Google Calendar pour partager votre agenda avec votre conjoint(e), des to-do lists intelligentes pour ne rien oublier (ex : Todoist ou Notion), ou des méthodes de gestion du temps (comme la méthode Pomodoro). Automatisez ce qui peut l’être : modèles d’emails, réponses automatiques, etc. Chaque minute gagnée sur l’organisation, c’est du temps de plus pour vos enfants ou pour boucler un projet.
Séparez autant que possible vie pro et vie perso
Essayez de dissocier les espaces et les moments. Si possible, aménagez un coin bureau à domicile pour signaler que vous êtes au travail. De même, lorsque vous êtes avec vos enfants, coupez les notifications et rangez l’ordi. Montrez-leur que vous êtes présent à 100%. À l’inverse, lorsque vous travaillez, focalisez-vous sans culpabiliser. Cloisonner mentalement aide à alléger la pression des deux côtés.
Communiquez, tant avec vos clients qu’avec vos proches
Soyez transparent avec vos clients sur votre statut de parent. Mentionnez que vous avez des enfants et que vous organisez votre travail en conséquence, notamment en proposant des horaires de réunion qui respectent votre emploi du temps familial. Anticiper et communiquer les imprévus montre votre professionnalisme. N’hésitez pas non plus à demander du soutien à votre entourage, à répartir les tâches avec votre partenaire ou à faire appel aux grands-parents. Ne restez pas isolé(e).
Prenez aussi du temps pour vous (sans culpabiliser)
Accordez vous des pauses véritables pour éviter l’épuisement. Une petite marche, une séance de sport ou quelques pages d’un livre pendant que bébé dort peuvent faire toute la différence. Réservez des jours off pour vous reposer ou pratiquer un hobby. Un freelance parent reposé sera beaucoup plus efficace qu’un zombie surmené. Souvenez vous que votre capital le plus précieux, c’est vous-même.
En combinant ces conseils, freelancing et parentalité peuvent réellement devenir un duo gagnant plutôt qu’un combat sans fin. Oui, cela demande de l’organisation, de la communication et un brin de lâcher-prise. Mais à la clé, il y a la satisfaction de réussir votre vie professionnelle et votre vie de parent selon vos propres termes.
Malgré les clients relous qui ne comprendront jamais pourquoi vous refusez un call à 19h, malgré les couches sales qui s’invitent au milieu d’une journée chargée, souvenez-vous que vous n’êtes pas seul dans ce cas – une armée de freelances parents traverse les mêmes épreuves, armés de café, d’amour et d’humour. Flexibilité, créativité, endurance : ce sont des qualités que vous développez chaque jour un peu plus grâce à cette double casquette. Et ces qualités font de vous un freelance encore meilleur !
Alors continuez à jongler, mais faites-le en prenant soin de vous. Clients heureux, enfants heureux… et parent freelance heureux – c’est tout le mal qu’on vous souhaite !